Faut-il renoncer à la Vérité ?

Donald Trump le 20 janvier 2017, nouveau président des Etats-Unis ©Maxppp - JUSTIN LANE/EPA/Newscom
Donald Trump le 20 janvier 2017, nouveau président des Etats-Unis ©Maxppp - JUSTIN LANE/EPA/Newscom
Donald Trump le 20 janvier 2017, nouveau président des Etats-Unis ©Maxppp - JUSTIN LANE/EPA/Newscom
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La notion de post-vérité accompagne aujourd'hui tous les discours et alimentent les débats. Serait-elle le signe d’une agonie de la notion de vérité ou le symptôme de sa perte ? Une émission enregistrée à la Sorbonne le 6 octobre, dans le cadre du forum Les Idées Claires.

Diffusion du débat enregistré le 6 octobre dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne à Paris, en public, à l’occasion de la 27e édition de la Fête de la science où France Culture organisait le forum Les idées claires.

Les invités :

  • Jean-Claude Ameisen, médecin, chercheur, professeur d’immunologie à l’Université Paris Diderot et producteur de l'émission Sur les épaules de Darwin sur France Inter
  • Frédéric Worms, philosophe, professeur à l'ENS et directeur du Centre international d’étude de la philosophie française contemporain

Savez-vous quel mot a été élu mot de l’année en 2016 par le Dictionnaire d'Oxford ? : « Post-truth ». Et depuis, la post-vérité, qui traduit une situation où les émotions et les opinions supplantent la réalité des faits, accompagne tous les discours et alimentent les débats. Son utilisation a connu une explosion en 2016 avec le référundum du Brexit au Royaume Uni, et l’élection de Donald Trump aux Etats Unis.

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Qu’est-ce qui dans cette expression serait pertinent au point d’être brandi à chaque tentative de définition de notre époque ? Ou si nous prenons le problème à l’envers : qu’est-ce qui dans le mot vérité ne suffit plus à caractériser notre époque ? La post-vérité est-elle le signe d’une agonie de la notion de vérité ou le symptôme de sa perte ? Le meilleur moyen d’exprimer notre inquiétude face à la disparition redoutée de la vérité ?

Cette inquiétude n’est pas nouvelle : l’existence d’une vérité est précisément ce qui opposait Platon aux sophistes. On pourrait même dire qu’elle a structuré l’histoire de la philosophie et l’histoire de la pensée depuis les premières traces écrites que nous en avons. Qu’est-ce qui a alors changé aujourd’hui ? Faudrait-il céder aux sirènes de la post-vérité et renoncer à l’idée de la vérité unique et indiscutable ? Quel serait le prix intellectuel, philosophique, politique et éthique à payer ?

Donald Trump ou l'idéologie du doute systématique

C’est la première fois qu’on a au sommet du pouvoir, avec Donald Trump, une idéologie du doute systématique sur la vérité. Tout autoritarisme est fondé sur l’imposition d’un discours, mais je crois que jusqu’ici c’est la première fois qu’on a au pouvoir dans une démocratie, avec une légitimation électorale, un pouvoir qui dit : il n’y a pas de vérité, on peut tout mettre en doute dans tous les sens.        
Frédéric Worms

Les vérités et les domaines de validité

Pour les sciences, il y a ce qu’on appelle les domaines de validité : il n’y pas « la vérité » mais ce qu’on peut approcher le mieux à un moment donné de la réalité dans un domaine. Un astrophysicien qui fait des découvertes remarquables sur les galaxies n’a rien à dire à priori sur l’Histoire, sur la biologie du cancer ou la paléontologie. Mais ensemble, ils peuvent par contre construire une approche transdisciplinaire qui dépassera chacune de ces recherches pour essayer d’avancer.        
C’est pour ça qu’il y a « des » vérités, la recherche de la vérité se fait et n’a de sens que si elle est falsifiable et s’opère avec une méthode particulière et dans un domaine de validité particulier.        
Jean-Claude Ameisen

Adèle Van Reeth, Jean-Claude Ameisen et Frédéric Worms dans le grand Amphithéâtre de la Sorbonne
Adèle Van Reeth, Jean-Claude Ameisen et Frédéric Worms dans le grand Amphithéâtre de la Sorbonne
© Radio France - A. Landivier

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