Livret A : le taux passera à 0,50 % en février
Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a décidé de faire passer le taux du Livret A de 0,75 % au plancher de 0,50 % en février. Jamais le « placement préféré » des Français n'avait si peu rapporté.
Par Raphaël Bloch
C'est un véritable coup de tonnerre dans le ciel des épargnants. Le Ministre de l'Economie et des Finances, Bruno Le Maire, a décidé mercredi d'appliquer la nouvelle formule du Livret A, faisant passer le taux du « placement préféré » des Français de 0,75 % à 0,50 % à partir du 1er février. Jamais le taux n'a été aussi bas.
Il aurait été « irresponsable et incohérent » de maintenir ce taux à 0,75 % par rapport à « notre politique de diversification des placements » et aux « milliers de Français qui attendent un logement social », a expliqué le ministre lors d'un entretien au quotidien « Le Parisien ».
Cette décision était particulièrement attendue. Après un peu plus de deux ans de gel, Bercy devait décider dans les jours qui viennent s'il appliquait ou non la nouvelle formule arrêtée en 2016. Mais les pronostics n'allaient pas dans le sens d'une baisse. « C'est très audacieux, surtout dans la période », confirme un bon connaisseur du dossier. « Le gouvernement a décidé de se saborder », ajoute un autre.
Politiquement très risqué
Le sujet est en effet politiquement sensible. En pleine réforme des retraites et face aux « gilets jaunes », baisser le taux de rémunération de ce placement populaire (55 millions de contrats) pourrait alimenter le mécontentement à quelques semaines des élections municipales. « Difficile de toucher au pouvoir d'achat avant des élections », souligne Philippe Crevel, président du Cercle de l'Epargne.
Mais Bercy a décidé d'appliquer la formule, respectant ainsi son engagement de dépolitiser le sujet. Les chiffres de l'inflation, qui servent de base de calcul à la nouvelle rémunération du Livret A, avec les taux interbancaires à court terme (EONIA), ont été publiés mercredi matin : 1,5 % (1,2 % hors tabac).
Or à ce niveau, le taux du Livret A devait baisser d'environ 50 points de base, à un peu moins de 0,25 % (0,23% précisément) en tenant compte de l'inflation hors tabac (0,87 % sur six mois) et de l'EONIA (-0,42 % sur le deuxième semestre).
La nouvelle formule prévoit toutefois un plancher à 0,50 %. « Il fallait, quoi qu'il arrive, baisser le Livret A au plancher, balaie un bon connaisseur du dossier. C'était très compliqué de justifier le maintien du taux à 0,75 % alors que tous les autres taux ne font que baisser. »
« Je ne vois donc pas aujourd'hui de raison de déroger par exception à la formule de calcul du taux du Livret A », avait déclaré mercredi matin lors d'une audition au Sénat François Villeroy de Galhau, le Gouverneur de la Banque de France, qui assure le calcul de la rémunération du Livret A.
L'inflation qui remonte
Sur le papier, la baisse du taux à 0,50 % devrait coûter en moyenne « un euro » par mois aux 55 millions de détenteurs d'un Livret A. « Cela représente 12 euros par an par Français, c'est supportable », veut croire une source proche des négociations.
En contrepartie, Bercy espère diminuer les charges financières de la Caisse des Dépôts qui finance le logement social en France avec les encours du livret A. L'économie représenterait plus de 300 millions d'euros par an. Elle permettrait de financer « la construction de 17 000 logements de plus ou la rénovation de 52 000 autres », selon la Banque de France.
Autre priorité pour le gouvernement : réorienter l'épargne vers des investissements plus productifs à travers les nouveaux produits créés par la loi Pacte (Plan épargne retraite, nouveaux fonds eurocroissance).
Par ailleurs, à 0,50 %, le nouveau taux du Livret A va s'imposer comme un seuil psychologique pour les épargnants, permettant d'expliquer plus facilement la baisse de rendement des autres produits dits sécurisés, comme l'assurance-vie.
Raphaël Bloch