► Comment cette consultation a-t-elle été organisée ?

Marwan Muhammad, statisticien de 39 ans et ancien directeur du Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF), avait annoncé en mai dernier le lancement d’une Consultation nationale des Français musulmans sur Internet et sur le terrain, avec 57 villes sollicitées. Les résultats ont été analysés par un comité de huit scientifiques. « Nous n’en sommes qu’au début de l’analyse, le plus gros reste à venir, il faut étudier au cas par cas les réponses données et développées dans les questionnaires », explique à La Croix Marwan Muhammad.

La moitié des questions posées aux fidèles concernait les instances nationales chargées d’organiser le culte musulman en France, à commencer par le Conseil français du culte musulman (CFCM). Les autres se centraient sur le traitement médiatique de la question de l’Islam en France.

« Cette consultation a été lancée parce qu’il revient aux musulmans de décider pour eux-mêmes et par eux-mêmes de leur organisation », signale Marwan Muhammad qui évoque alors le rapport de l’Institut Montaigne pour réformer l’Islam de France sorti mi-juillet, sous la direction d’Hakim El Karoui : « Ce rapport analyse l’Islam uniquement sous le prisme du terrorisme et du paradigme sécuritaire. Notre consultation, elle, propose une lecture de l’islam du réel. »

► Que retenir de ses résultats ?

« Le premier résultat, c’est la participation à cette consultation », signale son instigateur. D’après lui, l’implication de ces 27 000 répondants alors qu’il n’en attendait que 10 000, prouve bien que les musulmans veulent s’organiser eux-mêmes et qu’ils attendent que l’État leur fasse confiance.

Selon la consultation, le choix des structures serait l’affaire des fidèles : 71 % des participants considèrent que l’État ne doit pas ingérer dans l’organisation de l’Islam.

Par ailleurs, seuls 7 % des répondants se sentent représentés par le CFCM. Une institution que Marwan Muhammad avait fustigée ouvertement dans sa tribune publiée dans Le Monde en mai dernier pour lancer sa consultation. Si le CFCM ne semble pas efficace, la majorité des musulmans interrogés considèrent qu’ils ont besoin d’une structure nationale leur permettant de mieux s’organiser et d’être représentés. « Ils sont 85 %. C’est le résultat qui m’a le plus surpris. Je ne pensais pas que cette structure nationale était un besoin aussi important pour les musulmans de France », confie-t-il.

Cette organisation nationale aurait comme priorité absolue, toujours d’après le sondage, de « représenter les musulmans dans les médias » avant tout, et, en deuxième place, de « lutter contre l’islamophobie ». L’image médiatique de l’Islam de France serait décalée de leur réalité. Pour 96 % d’entre eux, ce traitement médiatique n’est « ni juste ni équilibré ».

► Quelles propositions nouvelles en ressortent ?

De ces premières analyses, le comité scientifique et les initiateurs de la consultation proposent « 7 actions pour la suite ». « Elles traduisent la volonté de faire et la capacité de faire de ces communautés », explique Marwan Muhammad qui ajoute qu’elles « proposent une organisation horizontale, qui ne vient pas de l’extérieur ».

Parmi elles, la création d’une plate-forme indépendante des associations et des mosquées qui couvrirait l’ensemble du territoire. Nommée « L.E.S Musulmans », elle est définie comme « un premier maillage d’ampleur nationale ». 150 organisations sont, pour l’instant, prêtres à y participer. Autre action : la création d’une centrale d’achats pour « mutualiser les besoins » et réaliser des économies sur les projets des communautés musulmanes, en matériel pédagogique par exemple.

Enfin, c’est l’élaboration d’une application pour smartphone qui est proposée. Elle permettra d’accéder à des informations pratiques, de répondre à des questions religieuses.