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Article publié le 1er février 2018.

Enquêtrices et enquêteurs de l’Insee STOP à la baisse de pouvoir d’achat et aux augmentations continues de la charge de travail !

Le tract des syndicats CGT, FO et SUD de l’Insee

La loi Sauvadet du 12 mars 2012 était destinée à mettre fin à la précarité des emplois contractuels de la fonction publique. À ce titre un Nouveau Cadre d’Emploi des Enquêtrices et enquêteurs (NCEE) a été mis en place à l’Insee au 1er janvier 2013. Ce quasi-statut, bien qu’insuffisant à bien des égards, notamment celui des rémunérations, semblait rompre avec une certaine forme de flexibilité et de précarité qui caractérisait le système antérieur de la pige : il instaurait en effet une meilleure protection sociale, une garantie salariale et une certaine pérennité des contrats (CDD ou CDI après 6 ans de CDD), même en l’absence de titularisation.

Mais depuis son entrée en vigueur, la direction de l’Insee se réfugie alternativement derrière la relative "normalisation" juridique du statut des enquêtrices et enquêteurs ou au contraire derrière les spécificités de leur statut ou de leur métier (non titulaires exerçant une activité nomade sur la base d’un forfait horaire) pour refuser de régler les problèmes qu’elles et ils rencontrent au quotidien, ou pour leur imposer des contraintes qui se rigidifient d’année en année. Celles-ci pèsent de plus en plus sur leur pouvoir d’achat et leur charge de travail, à un point qui est aujourd’hui devenu insupportable pour la plus grande partie des enquêtrices et enquêteurs (voir ci-après nos explications détaillées).
Rappelons qu’à quotité égale, ce sont les agents de l’institut qui ont la fois le plus grand nombre d’heures travaillées dans l’année... et le plus faible niveau de rémunération !
C’est pourquoi nous appelons les enquêtrices et enquêteurs à des actions de boycott décidées collectivement dans leur établissement, et à signer la pétition revendiquant :

  • une mesure de pouvoir d’achat immédiate pour tout le monde au titre de la somme débloquée en 2018, et à terme une augmentation de 25 points d’indice et une prime "d’agent isolé" de 150 euros par mois, non proratisable ;
  • la mise en place d’un régime de remboursement des frais qui tienne compte du caractère permanent des déplacements et soit adapté à leur activité, en métropole comme dans les Dom ;
  • la mise en place d’une procédure permettant la gestion des arrêts maladie en temps réel pour arrêter les reprises de trop perçus dont les délais et montants sont inacceptables ;
  • la prise en compte dans le calcul de la charge de travail de tout le travail administratif lié à l’envoi de documents par messagerie ;
  • l’arrêt des ajouts de charge non pris en compte dans Opale à chaque nouvelle enquête, modification de protocole ou atterrissage d’application ;
  • la transparence totale sur le calcul de la charge de travail avec communication trimestrielle à tou-te-s des données de référence et interdiction de les modifier sans discussion préalable.

Remboursement des frais : les enquêtrices et enquêteurs doivent payer pour travailler

Depuis la mise en place des NCEE, les remboursements de frais des enquêtrices et enquêteurs se font sur la base d’un texte générique de la Fonction publique, le décret n°2006-781 du 3 juillet 2006, qui établit des barèmes de remboursement forfaitaires pour les repas, mais également pour les déplacements lorsque les agents utilisent leur véhicule personnel. Aujourd’hui, l’application de ce texte conduit à ce que nombre d’enquêtrices et enquêteurs perdent de l’argent en allant travailler. Et ce d’autant plus en période d’augmentation du carburant !

Pourquoi pénalise-t-il particulièrement les enquêtrices et enquêteurs ? Parce que comme son nom l’indique, ce texte fixe "les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements temporaires des personnels civils de l’État" et n’a pas été conçu pour rembourser correctement des agents dont l’activité entière repose sur des déplacements permanents. S’agissant du remboursement des frais kilométriques, le barème prévu est dégressif dès lors que l’agent dépasse les 10 000 kilomètres annuels. Les frais supplémentaires d’entretien du véhicule personnel, de réparation des dommages, des impôts, taxes et assurances acquittés pour le véhicule ne sont pas remboursés, et l’agent doit souscrire une police d’assurance couvrant sa responsabilité de façon illimitée.
Ce texte n’est censé s’appliquer qu’aux agents en mission dont la mission ne dépasse pas une année (ou aux agents dits "en tournée" pour les Dom), et part du principe que l’usage du véhicule personnel est exceptionnel, sur autorisation du chef de service. Il n’est donc pas adapté aux enquêtrices et enquêteurs pour qui l’usage du véhicule personnel est permanent et imposé par l’employeur ! La direction de l’Insee elle-même doit le trouver inadapté puisqu’elle a inventé,des modalités spécifiques de remboursement des frais de repas qui n’y figurent pas : imposition de justificatifs de repas, avec clauses restrictives. Pour paraître moins injuste, elle les a étendues à l’ensemble des agents au forfait, et notamment aux superviseur-se-s, en ne s’appuyant sur aucune base juridique !

Il est temps que la direction mette en place d’un système de remboursement des frais spécifique pour les enquêtrices et enquêteurs, qui permette de rembourser leurs dépenses réelles dans tous les domaines (repas, déplacements, mais également dépenses engagées au domicile), en métropole comme dans les Dom ! Et qu’elle cesse sous couvert d’ « équité » d’imposer aux superviseur-se-s des clauses restrictives qui n’ont pas lieu d’être !

Arrêts maladie : double peine pour les enquêtrices et enquêteurs

Certains textes applicables aux titulaires de la Fonction publique sont donc appliqués également aux enquêtrices et enquêteurs dès lors qu’ils sont restrictifs (remboursements de frais, autorisations de cumul...). Mais à l’inverse, elles et ils ne bénéficient pas des dispositifs plus favorables dont bénéficient les titulaires. C’est particulièrement le cas en matière de protection sociale.

Contractuel-le-s de l’État, les enquêtrices et enquêteurs relèvent pourtant du régime général : leur protection sociale n’est pas gérée par l’État employeur, mais par les CPAM de leur lieu de résidence. Cela pose de nombreuses difficultés en cas d’arrêt maladie : l’Insee continue à verser des salaires pour les enquêteurs et enquêtrices, pendant que la CPAM verse des indemnités journalières... Mais cela se traduit ensuite par des reprises de trop perçus avec parfois des décalages temporels tels que le montant des sommes reprises ne permet plus de vivre décemment ! Ces situations concernent notamment les enquêtrices et enquêteurs en arrêt pour de longues périodes : ils et elles ne peuvent bénéficier de leurs droits tant que l’avis du Comité médical n’a pas été rendu, d’où des délais de gestion très longs.
Certes, la direction de l’Insee n’est pas directement responsable de cette situation, imposée par un cadre juridique contraint. En revanche, et malgré nos demandes répétées, elle ne fait rien pour améliorer les difficultés des enquêtrices et enquêteurs : aucune note de gestion permettant une information préalable des agents, et aucune mention claire de la nature, du mode de calcul et de la période de référence des sommes reprises, voire parfois aucune réponse aux demandes d’explication. Encore récemment, nous avons dû nous battre pendant de longs mois pour obtenir que le calcul de l’indemnité de licenciement des enquêtrices licenciées pour inaptitude (suite à épuisement de leurs droits) tienne compte de leur ancienneté totale dans le réseau, y compris avant le passage aux NCEE.

Nous réclamons d’urgence la mise en place d’une procédure permettant la prise en compte au plus près du temps réel des arrêts maladie, et la rédaction d’un livret d’information détaillé permettant aux enquêtrices et enquêteurs de connaître et faire valoir leurs droits en matière de protection sociale.

Charge de travail : moins d’effectifs mais plus de travail

La direction ne traite pas les problèmes de pouvoir d’achat des enquêtrices et enquêteurs mais dans le même temps, elle impose insidieusement des augmentations répétées de charge de travail "métier" par des ajouts de questions dans les enquêtes (CVS), des contraintes supplémentaires dans les protocoles (relevés de prix), ou en faisant atterrir de nouvelles applications sans formation préalable des enquêtrices et enquêteurs (Omer), obligations administratives consécutives aux accès à l’ntranet et à la messagerie insee. D’où de plus en plus de situations individuelles de santé dégradées : burn out, dépressions, démissions… dans les Dem/prix et dans le réseau des enquêtrices et enquêteurs. Comment en est-on arrivé là ?

Au moment de l’entrée en vigueur des NCEE, toute l’organisation du travail s’est trouvée modifiée, pour les enquêtrices et enquêteurs comme pour les agents des bureaux Dem et prix. Passer d’un système de rémunération à la tâche à un système de rémunération lié à une quotité nécessitait d’établir des équivalences entre la charge attribuée (incluant les déplacements) et le temps de travail, et de mettre en place de nouveaux outils de gestion (Chester puis Opale).

Dès le départ, la direction a tenté de faire des économies, d’une part en n’utilisant pas l’ensemble du plafond d’emploi disponible pour augmenter les quotités contractuelles des enquêtrices et enquêteurs, d’autre part en "maximisant" la charge de travail individuelle calculée au plus juste sur les périodes de creux ... et donc plus tenable dans les périodes de pic de charge ! Or, depuis quatre ans, le plafond d’emploi a diminué, la direction ne s’est pas organisée pour lisser la charge annuelle de travail, et elle a inventé un système d’augmentations temporaires de quotité qui lui permet de gérer les pics sans avoir à pérenniser des quotités convenables pour celles et ceux qui les souhaitent. Et pour garder à sa disposition pleine et entière les enquêtrices et enquêteurs à temps incomplet, elle sur-interpètre les clauses restrictives des textes sur les cumuls d’emploi pour les refuser.

Le premier système d’équivalence mis en place était déjà fort insatisfaisant dans son contenu, notamment parce qu’il ne reconnaissait pas une grande partie du travail administratif effectué à leur domicile par des enquêtrices et enquêteurs. Mais il avait au moins l’avantage de la transparence puisqu’il avait été présenté aux organisations syndicales. Depuis, les changements se font au fil de l’eau.

Opale, le nouvel outil mis en place en 2016 a certes modifié une partie des critères utilisés et rendu certains calculs plus proches de la réalité du travail d’enquête, notamment pour l’estimation des distances effectuées. Pour autant, il n’a pas donné lieu à une négociation sur les changements importants qu’il impliquait, ni à une transparence de son utilisation :

  • Certaines Dem/prix, contraintes par un programme de travail non adapté et pour lequel la direction nationale exige des résultats, « ajustent » des charges de travail individuelles avec les outils du bord : augmentation de la vitesse de déplacement notamment, ce qui permet une augmentation mécanique de la charge de travail.
  • Pour les relevés de prix, la direction nationale pilote en solo : modifications de la prise en compte des trajets (mais sans bilan malgré les demandes, alors que ces modifications ont été préjudiciables pour certain-e-s enquêtrices et enquêteurs), modification de la prise en compte de certains relevés (codes Z supprimés du temps de travail alors qu’ils donnent parfois lieu à des tentatives : mais cela arrange bien la direction qui peut se targuer d’une baisse de leur nombre). De plus, les arbitrages d’affectations d’effectifs d’enquêtrices et enquêteurs s’effectuant maintenant hors des sphères prix, cela joue en défaveur de ces unités.
  • In fine des enquêtrices et enquêteurs ont pu se retrouver avec une charge de travail trop importante (dépassement large de la limite du temps de travail sur plusieurs semaines), trop diversifiée (trop d’enquêtes à maîtriser en même temps, ou dans des lieux trop éloignés les uns des autres), ou dans un laps de temps trop restreint (enquêtes emploi à réaliser dans les 2 semaines prévues même…quand l’enquêtrice la reprend en urgence en cas de maladie d’un-e collègue !)

Cette difficulté de gestion des calendriers se retrouve à la fois pour les enquêtrices et enquêteurs qui se retrouvent temporairement surchargés, mais aussi pour leurs collègues des bureaux Dem/prix qui doivent gérer des calendriers (enquêtes, absences prévues ou non, formations…) insolubles.

Dans une période où l’arrivée d’un nouvel échantillon d’enquêtes (Nautile) et le prochain atterrissage du projet Données de caisse font peser de grandes incertitudes sur les enquêtrices et enquêteurs des réseaux ménages et prix, ce pilotage à vue de la charge de travail n’est plus admissible !

Et il est encore moins admissible que la direction, qui pourrait aujourd’hui faire bénéficier l’ensemble des enquêtrices et enquêteurs d’un coup de pouce salarial, veuille utiliser la somme à disposition pour une prime individuelle liée à "l’engagement professionnel" des enquêtrices et enquêteurs, quand elle-même ne s’engage pas pour leur donner les moyens de travailler correctement !

Le 1er février 2018

Cette pétition a été signée par plus de 600 personnes et a été remise à la direction de l’Insee lors de réunions avec l’administration, notamment le 20 mars 2018 lors du comité technique de réseau de l’Insee (CTR).
Merci à toutes et à tous pour votre participation !

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