Foursquare n’est pas mort : c’est devenu un spécialiste de la collecte et de la revente de (vos) données

Vous vous souvenez quand vous étiez « Mayor » de votre lieu de travail (ou de votre restaurant préféré) début 2010 ? Vous avez sûrement assisté au lent déclin du service en pensant que celui-ci avait peu à peu périclité pour rejoindre finalement le cimetière du web. Il n’en est rien, Foursquare se porte très bien, et revend à de nombreuses entreprises les milliards de donnée collectées pendant des années.

foursquare

New York Magazine a enquêté sur ce qu’était devenue l’application star du début des années 2010, et a découvert que contrairement à ce que l’on pouvait penser, elle se portait très bien. Cette année, Foursquare va générer 100 millions de dollars de chiffre d’affaires, et comme souvent dans le web, ce revenu est basé sur la data.

Des milliards de données grâce aux check-in

En 2014, Foursquare a fait le choix de pivoter et de devenir une « plate-forme technologique indépendante » spécialiste dans la récolte et la vente de données de localisation. Tous vos check-in au Mac Do près de chez vous ne sont pas inutiles pour tout le monde. Parmi les clients actuels de Foursquare : Uber, Twitter, Apple, Snapchat, Microsoft… Foursquare a plusieurs axes de développement : son très bon outil de géolocalisation intégrable à n’importe quelle application, et des milliards de données monétisables.

Pour bien situer la quantité de données dont Foursquare dispose, il faut se rappeler qu’Obama lui-même utilisait l’application pour « check-in » dans les lieux publics. En 2010, Doug Wheelock devenait le premier homme à faire un check-in dans l’espace depuis l’ISS. Tout le monde voyait Foursquare comme le prochain Facebook, et le concept de « réseau social de géolocalisation » semblait être un produit d’avenir.

La réalité fut en un peu différente et, dès 2013, la base d’utilisateurs commença à s’éroder, la faute à un service qui ne sert globalement pas à grand chose. Certains irréductibles ont continué de checker sur Foursquare puis sur Swarm. Cela aurait pu être la fin annoncée de Foursquare, mais c’était sans compter sur la gigantesque quantité de données dont disposait l’entreprise. Dès 2014, Foursquare a donc concentré son développement sur des produits destinés aux marques, aux développeurs et aux annonceurs.

Une technologie prédictive efficace

La suite est passionnante. Foursquare a d’abord vendu sa technologie de géolocalisation des utilisateurs à des entreprises tierces. 150 000 clients ont depuis intégré la solution de Foursquare pour géolocaliser leurs utilisateurs. Et Foursquare s’est attelé à la vente de données d’une précision rare sur le marché des data brokers : constructions de profils de consommateurs selon les derniers magasins visités, selon les endroits où les gens marchent… Foursquare a ainsi commencé à faire des projections de ventes de produits selon les visites en magasins physiques. En 2015, Foursquare prédisait les ventes d’iPhone par rapport aux visites dans les Apple Store. En 2016, ils prédisaient la chute des ventes de Chipotle. Ils ont aussi pu analyser une hausse des visites dans les magasins Nike après les campagnes publicitaires sur Colin Kapernic, ou une baisse de fréquentation des établissements Trump après son élection.

Les milliards de check-in sur Foursquare ont permis une précision des données incroyable : Foursquare savait quand la dimension d’un magasin avait changé ou si les bureaux étaient au 8ème ou au 9ème étage. Foursquare proposait en plus un opt-in pour automatiquement géolocaliser les utilisateurs. Résultat : 14 milliards de check-in et 105 millions de lieux référencés. Tout cela a offert à Foursquare une cartographie de meilleure qualité (du moins pour un usage commercial) que celle de Google et Facebook. Foursquare aurait aujourd’hui 100 millions de profils prêts à être activés par ses partenaires.

Quel cadre pour l’utilisation des données ?

En faisant profil bas, Foursquare évite aussi un scandale à la Cambridge Analytica, alors que le tableau est sensiblement le même. Des millions de données récoltées sans trop de consentement il y a plus de 10 ans sont aujourd’hui utilisées et revendues à des fins publicitaires. Évidemment, Foursquare affirme utiliser ces données avec transparence et de façon responsable. La firme a ainsi anonymisé certaines données sensibles comme par exemple la visite de lieux LGBT. Foursquare affirme par ailleurs utiliser des données « pseudonymisées » et « anonymisées » avec tout le flou que cela comporte.

Pour lire l’excellente enquête du New York Mag à ce sujet, rendez-vous sur ce lien.

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1 commentaire
Commentaire (1)
  • Gildas

    Je ne comprend pas bien comment des données utilisateurs qui ont plus de 5 ans peuvent servir à un ciblage publicitaire maintenant. La fraicheur de la donnée est importante que ca soit pour établir le profil des consommateurs comme pour avoir des info sur les lieux qui fonctionnent. Peut-être qu’ils centralisent toutes les données récoltées via leurs technologies par leurs partenaires actuellement. Si c’est le cas ca semble encore plus touchy!!

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