Make our university great again ! Un investissement concret et immédiat à l'université

Make our university great again ! Un investissement concret et immédiat à l'université

Lancée le
26 juin 2017
Adressée à
Frédérique Vidal (Ministre de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l'Innovation) et
Pétition fermée
Cette pétition avait 1 377 signataires

Pourquoi cette pétition est importante

Lancée par Un collectif de l'université

[Mise à jour du 11.09.17 : en dépit de la promesse de campagne faite par le candidat Emmanuel Macron de "sanctuariser le budget de l'enseignement supérieur et de la recherche", un plan d'économies de 331 millions d'euros a été présenté par son gouvernement fin juillet pour l'Enseignement supérieur et la recherche. A l'université, la situation, déjà critique, s'annonce désormais tragique.]

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Par un collectif d’enseignants, de chercheurs et d'agents exerçant à l’Université. (Liste des premiers signataires à la fin du texte),26.06.17

Comme l’a révélé Le Monde du 7 juin[1], quinze universités se trouvent aujourd’hui dans une situation budgétaire dégradée ou très dégradée. Or la période est critique pour toute la communauté universitaire, sur l’ensemble du territoire. Notre intention est toujours d’innover, de démocratiser l’accès à l’enseignement supérieur et de préparer nos étudiants à l’insertion professionnelle, mais les conditions d’exercice actuelles nous permettent de moins en moins de remplir nos missions de service public. Il est temps de garantir à l’Université les moyens de ses ambitions.

Nous, personnels administratifs, techniques et de bibliothèque, enseignants, chercheurs, expérimentons depuis une décennie l'autonomie de l'Université et la baisse des budgets et des moyens qui l’a accompagnée. Nous ne pouvons qu’en tirer une amère conclusion : nous ne parvenons pas à maintenir la qualité de nos offres de formation. Même si nous nous sommes transformés en secouristes du service public, notre travail ne peut se poursuivre sans un budget approprié. Il est de notoriété publique que le calcul du « glissement vieillesse-technicité » n’a pas été pris en compte dans les dotations attribuées aux universités lors de la mise en œuvre de la loi Libertés et Responsabilités des Universités, dite LRU, en 2007. Cela signifie que le coût de la masse salariale augmente mécaniquement chaque année, au rythme des progressions de carrières. Tout se passe comme si on demandait implicitement aux établissements de choisir entre le maintien des salaires des agents titulaires et le remplacement des fonctionnaires mutés ou partis à la retraite. La « sanctuarisation » du budget de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche promise par le nouveau gouvernement ne suffira donc pas à inverser la tendance. Pire, une telle formulation masque la dégradation des conditions matérielles qui frappe l’enseignement supérieur. Contrairement à une affirmation récurrente, nous ne fonctionnons nullement « à moyens constants » mais avec des moyens sans cesse réduits, que la hausse des coûts et des effectifs rabote chaque année un peu plus.

Comment accueillir sereinement toujours plus d’étudiants ?

Mme Frédérique Vidal, notre nouvelle ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, invitée le 15 juin dernier dans les Matins de France Culture, l’a clairement annoncé : 45 000 étudiants supplémentaires rejoindront les bancs des facultés dès septembre. Malheureusement, dans le même temps, la stabilité des équipes d’agents et d’enseignants, propice à la bonne organisation des études, est menacée par le manque chronique de moyens. Dans tout le pays, la situation est aujourd’hui alarmante, au point que de nombreux départements ne seront pas en mesure d'assurer la prochaine rentrée. A l’Université de Bourgogne, 40 000 heures de cours seront ainsi supprimées. L’Université Paris 13 fait face à un déficit de 5 millions d’euros, entraînant une baisse de 10% de son budget de fonctionnement. En cours d’année, l’Université de Bretagne-Sud a subi une baisse imprévue des subventions publiques, tandis que l’Etat procédait à un prélèvement de 1,108 millions d’euros sur son fonds de roulement. A l’Université Toulouse-III, 200 postes devraient être supprimés de 2017 à 2019. Mais au-delà de la dégradation de nos propres conditions de travail, c’est bien la détérioration des conditions d’accueil des étudiants qui nous inquiète. Comment mener à bien notre mission de service public lorsque les postes d’enseignants, de chercheurs et d’agents administratifs ne sont pas renouvelés, le matériel de laboratoire obsolète n’est pas remplacé, les commandes d’ouvrages en bibliothèque sont suspendues, les dispositifs de remédiation purement et simplement supprimés et les locaux devenus trop exigus pour endiguer l’augmentation des effectifs ?

Jusqu’ici, nous avons tout tenté pour contourner les difficultés budgétaires : c’était le règne du système D. Les enseignants et les chercheurs sont désormais investis de missions administratives chronophages (étude des candidatures étudiantes, élaboration des emplois du temps, salons, journées portes ouvertes, rédaction des dossiers d’évaluation et d’accréditation des formations…). A ces tâches s’ajoute le recrutement d’un nombre croissant de vacataires précaires, en lieu et place de collègues titulaires, lorsque l’enveloppe budgétaire le permet encore. Et puisqu’il faut attribuer une charge importante de cours à des doctorants dont c’est la première expérience d’enseignement, nous voudrions avoir la possibilité de les y préparer au mieux. Mais cela n’est guère possible, faute de temps de concertation et de formation, au détriment, là encore, de l’organisation des cursus.

Comment innover dans des universités fragilisées ?

C’est pourtant bien à l’Université que s’est opérée la véritable démocratisation de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche, c’est bien l’Université qui ouvre ses portes à des jeunes aux parcours divers, et pas seulement aux élèves surentraînés des filières sélectives ou des lycées les mieux classés. Dans toute l’Europe, l'excellence de la recherche et de l’enseignement se construit à l’Université ; nul autre pays que la France ne propose ce modèle bicéphale, schizophrène et extrêmement coûteux qui consiste à reproduire les élites dans les grandes écoles et reléguer les autres sur des campus bondés. Dès lors, comment concrétiser l'égalité des chances promise par nos élus ? C’est bien l’Université qui seule a su allier – depuis plusieurs décennies maintenant – les exigences de cet accueil élargi et celles de la recherche la plus pointue. Qui aujourd’hui en France oserait priver les bacheliers d’études supérieures, au risque de voir disparaître un enseignement de qualité, adossé à une recherche exigeante à la portée de tous ?

Pour accompagner ce mouvement de démocratisation, nous renouvelons nos pratiques didactiques et contribuons à la  professionnalisation de nos disciplines,  mais cela relève de la gageure. Dans ces conditions, le projet du Président de la République Emmanuel Macron d’afficher les « performances » du service en fin de semestre a tout d’une injonction contradictoire. Car la quête de l’excellence de la recherche française, indissociable de l’enseignement, a un prix. Or les tensions se généralisent, même au sein des universités aux finances apparemment saines. Les dotations budgétaires de chaque Unité de Formation et de Recherche (UFR) ne cessent de diminuer. Bien souvent, les problèmes présentés comme conjoncturels procèdent de dysfonctionnements structurels. Dans les faits, les baisses budgétaires correspondent à des fins de contrat pour des membres du personnel et des enseignants dont l’investissement au long cours est indispensable à l’organisation des cours, des travaux dirigés et des sessions d’examens. Les équipes se sentent négligées, démoralisées, alors que le dévouement collectif mériterait un minimum de reconnaissance.

De nombreux établissements font les frais de perpétuelles déconsidérations. Partout en France, la charge administrative et pédagogique qui échoit aux agents titulaires encore en poste est de plus en plus lourde, nous contraignant à effectuer des heures supplémentaires, voire du bénévolat, ce qui nuit non seulement au service, mais aussi à l’ambiance générale, à notre moral et en définitive à notre santé. Bref, à l’heure où la France prétend inviter des chercheurs étrangers à rejoindre les laboratoires de recherche de l’Hexagone pour améliorer le sort de la planète, charité bien ordonnée devrait commencer par soi-même, sous peine de faillite générale. Seule une augmentation significative du budget de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, ventilé équitablement, en fonction des besoins, sur l’ensemble des établissements français, permettra d’accueillir et d’encadrer dignement les nouveaux étudiants. Certes, les nouveaux venus s’annoncent nombreux, mais nous parions sur leur enthousiasme, et nous souhaitons leur assurer des conditions d’études matériellement, intellectuellement et psychologiquement propices à la construction d’un avenir individuel et commun prometteur.

Pour que les annonces d’investissement formulées à l’antenne de France Culture par Mme Vidal, notre nouvelle Ministre, soient suivies d’effets, nous tenons à lui adresser ce message, tout comme à notre nouveau Président, M. Macron : « Make our university great again ! »


[1] https://frama.link/LemondeSituationUniversite

Liste des premiers signataires :

Stéphane Bikialo, Université de Poitiers

Julie Bouchard, Université Paris 13

Vincent Brulois, Université Paris 13

Emmanuelle Bruneel, Université Paris-Est Créteil

Françoise Cahen, Université Paris 3

Cécile Coudriou, Université Paris 13

Sylvie Ducas, Université Paris 10

Olivier Ertzscheid, Université de Nantes

Raoudha Essadi, Université Paris 13

Maud Fontaine, Université Paris 13

Yann Garandel, Université Paris 13

Anne Gensollen, Université Paris 13

Raphaëlle Guidée, Université de Poitiers

Karine Grandpierre, Université Paris 13

Yves Jeanneret, Université Paris 4 (CELSA)

Sarah Labelle, Université Paris 13

Charlotte Lacoste, Université de Lorraine

Anne Larue, Université Paris 13

Christophe Léger, Université d'Aix-Marseille (CNRS)

Joëlle Le Marec, Université Paris 4 (CELSA)

Mathilde Lévêque, Université Paris 13

William Marx, Université Paris 10 (Paris Ouest Nanterre La Défense)

Judith Mayer, Université Paris 13

Florent Merlet, Université Paris 13

Sophie Noël, Université Paris 13

Claire Oger, Université Paris-Est Créteil

Thomas Piketty, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales

Maxime Pierre, Université Paris 7 

Luc Pinhas, Université Paris 13

Martin Rass, Université de Poitiers

Séverine Reyrolle, Université de Reims Champagne Ardenne

Katarzyna Roquais, Université Paris 13

Martine Samama, Université Paris 13

Aude Seurrat, Université Paris 13

Anne Sinha, Université Paris 13

Lucie Alexis, Université Paris 2

Adeline Wrona, Université Paris 4 (CELSA)

Pétition fermée

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