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Billet de blog 2 janvier 2020

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Revalorisation: dix milliards, loin du précédent historique des années 1990

Dix milliards pour la «revalorisation», c'est 0,4% du PIB. Mais de 1990 à 1993, la part de la dépense intérieure d'éducation dans le PIB est passée de 6,6% à 7,6%, puis est restée à cette hauteur jusqu'en 1997. On est loin de ce compte, du compte.

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Selon les premières indications du ministère de l'Education nationale, l’augmentation des salaires et des primes destinée aux enseignants devrait commencer le 1er janvier 2021 et serait étalée sur une quinzaine d’années. La montée en puissance serait progressive, à raison de 400 millions à 500 millions d’euros par an. A terme, le montant devrait atteindre 10 milliards d’euros.

En 2018, l'estimation du produit intérieur brut a été de l'ordre de 2300 milliards d'euros (2286 milliards en euros constants, 2353 milliards d'euros en euros courants). Dix milliards , c'est donc 0, 4 % du PIB; et 500 millions d'euros par an, c'est 0, 02% par an.

On est loin, très loin de l'augmentation de la part de la dépense intérieure d'éducation dans le PIB de 1990 à 1993 où l'on est passé de 6,6% à 7,6% (une augmentation de la part du PIB dévolue à l'éducation de plus de 0,3% par an). 

Il faut prendre "en compte" aussi (si l'on peut dire) les propos plutôt emberlificotés tenus par le président de la République à Rodez le 3 octobre dernier : "Si je revalorisais, comme je veux le faire, l’ensemble des enseignants… quand on parle de l’Éducation nationale dans notre pays, on parle d’un million de fonctionnaires. C’est le premier employeur du pays. Si je voulais revaloriser comme ça, c’est dix milliards ! Je vais pas mettre dix milliards demain ! C’est vos impôts, hein ! Ou c’est le déficit, c’est la dette pour nos enfants.
Donc. C’est investir sur notre éducation, faut repenser la carrière. Ça veut dire qu’il faut qu’on arrive à ce que la carrière progresse davantage. Qu’on ait un vrai dialogue avec l’ensemble des enseignants et leurs représentants. Il faut dire comment on fait mieux progresser la carrière, comment on paie mieux, comment du coup, parce qu’on paie mieux, peut-être on change aussi le temps de travail, la relation au travail, et je pense que les enseignants de votre génération ils sont tout à fait prêts et ils le font d’ailleurs, bien souvent, hors du temps scolaire, d’accompagner les jeunes différemment, que ce soit valorisé, que ça puisse être demandé aux enseignants. Que le métier change. Qu’on regarde aussi les périodes de vacances, par rapport aux autres. Et puis qu’on pense sa carrière, en valorisant beaucoup plus qu’on ne le fait aujourd’hui les périodes d’encadrement. Aujourd’hui quand vous êtes directeur dans le primaire, directeur de collège, c’est terrible ! C’est sous-valorisé. Ça crée des situations de stress très dures. Donc, qu’on valorise mieux cela."

On peut certes se demander si la considérable augmentation des efforts financiers qui a eu lieu durant les années 1990 a bien été employée en majeure partie pour la revalorisation des traitements des enseignants (car des moyens matériels et humains nouveaux ont été aussi consentis, notamment pour la mise en oeuvre de l'ambition décidée de mener 80% d'une classe d'âge au niveau du baccalauréat). On peut aussi se demander si la revalorisation a été particulièrement forte pour les enseignants du secondaire ou bien pour ceux du primaire (pour lesquels a été institué alors le nouveau corps des professeurs des écoles dont la grille indiciaire a été alignée sur celle des professeurs certifiés). On peut enfin s'interroger sur l'opportunité ou non de ces efforts financiers sans qu'ils soient accompagnés d'une ''redéfinition du métier'' d'enseignant.

Mais il reste sûr et certain qu'une augmentation importante de la part de la dépense d'éducation dans le PIB (0,3% par an) a eu lieu dans les premières années de la décennie 1990, sans commune mesure (bien que tout à fait possible) avec celle qui est actuellement envisagée (0,02% par an). Qu'on se le dise!

PS: la part de la dépense intérieure d'éducation dans le PIB est actuellement de 6,7%. On a de la marge pour progresser et revenir rapidement à ce qui a été tout à fait possible dans les années 1990: 7, 6%

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