Tout est complexe. Y compris trouver un plastique biodégradable pour le sac qui transportera la veste de ski depuis son usine de fabrication jusqu’à la réserve de la boutique de sport où elle sera vendue. « Il faut qu’il puisse protéger la veste pendant près de deux ans. Or, un sac en amidon de maïs ne résiste qu’un an », explique Julien Durant, cofondateur de la marque Picture, installée à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme). Depuis la création de cette marque de vêtements dits organiques, en 2008, ses dirigeants sont en permanence en train de chercher des solutions techniques pour réduire au maximum leur impact sur l’environnement.
Et si « ce sac plastique n’est pas transparent, la marchandise peut être bloquée en douane, faute de pouvoir être contrôlée. C’est d’une grande complexité », poursuit M. Durant. L’enjeu pèse lourd. Picture, dont le chiffre d’affaires devrait atteindre 24 millions d’euros sur l’exercice 2018, vend un demi-million de pièces par an. « Et potentiellement autant de plastiques à revoir », fait valoir le jeune entrepreneur. La PME espère trouver une solution pour la collection 2020-2021. Pas avant.
Au même prix que le textile conventionnel
Sur le papier, la création d’une marque d’outdoor écoresponsable paraît aisée. Patagonia a ouvert la voie dès 1973. Depuis, la fabrication de fils de polyester recyclés à partir de bouteilles de plastique est au point et bon marché. Les nouvelles matières textiles, notamment les déperlants dépourvus de PFC (perfluorocabures), sont monnaie courante. Et le coton bio gagne du terrain dans les champs, notamment en Turquie, et aussi dans nos placards.
Mais, à en croire M. Durant, rien n’est simple. Un sondage effectué sur les pistes de la station de ski des Deux-Alpes, peu avant le lancement de la marque, le lui a révélé. Le consommateur n’est pas prêt à payer « 10 % plus cher » pour acheter une veste de ski écoconçue, fut-il accro à la montagne et sensible à la question du réchauffement climatique. « Il y est prêt pour s’alimenter, observe M. Durant, mais pas pour s’habiller. »
Dès lors, Picture a décidé de créer des collections équitables et bio au prix du textile conventionnel. Ce cahier des charges oblige la PME à fabriquer ses collections à moindre coût à l’étranger, en Tunisie et en Chine. Il faut aussi convertir les vendeurs à son marketing de marque écoconçue. Vendue dans les magasins Au Vieux Campeur, la marque développe aussi son réseau de boutiques en franchise (dix à ce jour), afin de s’assurer que l’équipe de vente sache promouvoir sa philosophie auprès des clients. Cette année, elle espère ouvrir des franchises à Londres, Berlin et dans la station de Verbier, en Suisse.