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Billet de blog 3 mars 2016

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Illustration 1
kd

Victime d'une double fatwa, chez lui, en Algérie, relayée ici-même en France

Dans une préface inédite à son livre, La ferme des animaux, satire du système communiste soviétique, George Orwell dénonçait le conformisme intellectuel qui régnait en Grande-Bretagne. Du fait de l’alliance de revers nouée avec Staline, en juin 41, contre l’ennemi commun hitlérien, il était devenu très compliqué, se plaignait-il, de critiquer l’Union soviétique. Son livre, promis à un succès de librairie phénoménal, avait été refusé par quatre éditeurs. « Il y a en permanence », écrivait Orwell, « une orthodoxie, un ensemble d’idées que les bien-pensants sont supposés partager et ne jamais remettre en question. » Cependant, concluait-il, « Parler de liberté n’a de sens qu’à condition que ce soit la liberté de dire aux gens ce qu’ils n’ont pas envie d’entendre. »

C’est un rocher de Sisyphe qu’il faut sans cesse remonter sur sa colline. Aujourd’hui, les critiques du communisme sont autorisées - avec celles concernant l’islam, c’est beaucoup plus délicat. Notre ami Kamel Daoud en fait l’expérience. Comme le disait avant-hier sur France Inter Fawzia Zouari, le voilà victime d’une double fatwa. Celle, lancée contre lui, en Algérie, par un prédicateur salafiste  relayée par une autre fatwa, « laïque » celle-là, ici même, en France, issue d’un collectif d’universitaires qui lui reprochent une tribune publiée fin janvier dans Le Monde.

Aux yeux du doctrinaire, Kamel Daoud, par ses propos hérétiques sur l’islam, s’est rendu coupable du crime d’apostasie. Il mérite la mort. Hier, le procureur du tribunal d’Oran a réclamé contre ce prédicateur 6 mois de prison. L’affaire sera jugée mardi prochain.

Pour le collectif d’universitaires français qui l’attaquent dans Le Monde, « Kamel Daoud recycle les clichés orientalistes les plus éculés ». Qu’en est-il ?

Dans sa tribune, Kamel Daoud revenait sur les événements du Nouvel An à Cologne. Tout en mettant en cause une extrême droite européenne, prompte à assimiler les réfugiés-immigrés aux invasions barbares, il mettait en garde les Européens pour leur naïveté. « On voit dans le réfugié son statut, pas sa culture », écrivait-il. « On voit le survivant et on oublie que le réfugié vient d’un piège culturel que résume surtout son rapport à Dieu et à la femme. » Et il évoquait – je cite – « la misère sexuelle dans le monde arabo-musulman ». S’ensuivait une longue méditation sur le statut de la femme dans ce monde-là, qui « erre comme un bien d’autrui », sacralisée mais ne s’appartenant pas à elle-même. « La liberté de la femme en Occident y est vue », non pas comme une des causes de « sa suprématie », mais comme « un caprice de son culte de la liberté », une preuve de sa « décadence ».

La fatwa de nos universitaires s’appuie sur les chefs d’accusation habituels –culturalisme, impasse sur les déterminismes sociaux, islamophobie, néo-colonialisme et même racisme. Les procédés d’intimidation usuels de ceux qui relaient, ici, les fatwas prononcées là-bas, en tentant d’interdire toute discussion libre sur l’islam comme sur l’islamisme.

Il est bien plaisant de voir des gens installés dans la recherche et l’université françaises accuser un écrivain algérien menacé de mort de ces dernières infractions. Il est significatif aussi que les signataires semblent ignorer les innombrables pages consacrées par certains des plus célèbres écrivains contemporains du monde arabe à la question du refoulement de la sexualité et de l’infériorisation des femmes. De Alaa El Aswany, à Boualem Sansal, en passant par Hélé Béji et Wassila Tamzali, ils s’attaquent avec courage et lucidité à cette question fondamentale. Chez nous, Fethi Benslama en a analysé les mécanismes.

Martin Amis a écrit : « Tous les hommes sont mes frères, mais celui qui prétend que ma sœur ne vaut que la moitié d’un homme, celui-là ne peut pas être mon frère. » L’égalité entre hommes et femmes, la liberté de circulation des femmes dans l’espace public, dans la tenue vestimentaire de leur choix ne sont pas des lubies occidentales. Encore moins des stratégies obliques destinées à inférioriser les « néo-colonisés » que seraient nos concitoyens issus de l’immigration. Avec la laïcité elle-même, ce sont des conquêtes issues de longues luttes menées au nom de l’émancipation. Nous ne saurions y renoncer sans trahir celles et ceux qui les ont menées autrefois. Qu’une partie de la gauche, minoritaire dans l’opinion, mais puissante dans l’université et les médias, soit prête à les sacrifier à ses marottes multiculturalistes, constitue une incompréhensible trahison de ses propres idéaux. Les camps en présence sont en train de se mettre en place. Manuel Valls a choisi clairement le sien, hier, en faisant connaître son soutien à Kamel Daoud.

http://www.franceculture.fr/emissions/les-idees-claires/pour-kamel-daoud

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