Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 17 juin 2020, 18-11.737, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

IK



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 17 juin 2020




Cassation


M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 270 F-P+B

Pourvoi n° E 18-11.737




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 17 JUIN 2020

M. V... B..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° E 18-11.737 contre l'arrêt rendu le 31 octobre 2017 par la cour d'appel de Versailles (13e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. S... H... , domicilié [...] , pris en qualité de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Valparaiso,

2°/ au procureur général près la cour d'appel de Versailles, domicilié [...] ,

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Vallansan, conseiller, les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de M. B..., de la SCP Richard, avocat de M. H... , ès qualités, après débats en l'audience publique du 25 février 2020 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Vallansan, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Berthomier, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 31 octobre 2017), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 18 janvier 2017, pourvoi n° 14-24.314), la société Valparaiso a été mise en redressement judiciaire par un jugement du 30 septembre 2009, qui a fixé la date de la cessation des paiements au 15 juillet 2009. La procédure a été convertie en liquidation le 20 janvier 2010.

2. Le liquidateur a assigné M. B..., directeur général délégué de la société, en paiement de l'insuffisance d'actif.

Examen du moyen

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

3. M. B... fait grief à l'arrêt de retenir sa responsabilité pour la déclaration tardive de la cessation des paiements alors « que si l'omission de déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal est ainsi susceptible de constituer une faute de gestion, c'est à la condition qu'elle ait contribué à l'insuffisance d'actif ; que cette condition n'est remplie que si l'insuffisance d'actif s'est aggravée entre la date à laquelle la cessation des paiements aurait dû être déclarée (45e jour suivant sa survenance) et celle à laquelle elle l'a été ; que l'augmentation du passif constatée entre la cessation des paiements et la date à laquelle le dirigeant aurait dû la déclarer est sans incidence sur la responsabilité du dirigeant ; qu'en l'espèce, il était acquis aux débats que le jugement d'ouverture avait fixé au 15 juillet 2009 la date de cessation des paiements de la société Valparaiso, de sorte que M. B... aurait dû la déclarer au plus tard le 29 août 2009 ; qu'en tenant compte de l'augmentation du passif pendant la période du 15 juillet au 21 juillet 2009, donc antérieure à la date à laquelle devait être déclaré l'état de cessation des paiements, pour dire que la déclaration effectuée tardivement, le 21 septembre 2009, avait contribué à l'augmentation de l'insuffisance d'actif, la cour d'appel a violé l'article L. 651-2 du code de commerce, dans sa version applicable à la cause issue de l'ordonnance du 18 décembre 2008, ensemble l'article L. 640-4 du code de commerce dans sa version applicable à la cause antérieure à l'ordonnance du 12 mars 2014. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 651-2 du code de commerce :

4. Le jugement qui condamne le dirigeant d'une personne morale à supporter tout ou partie de l'insuffisance d'actif de celle-ci doit préciser en quoi chaque faute retenue a contribué à l'insuffisance d'actif.

5. Pour retenir la responsabilité de M. B..., l'arrêt relève que la déclaration de cessation des paiements du 21 septembre 2009 était tardive au regard de la date de cessation des paiements fixée par le jugement d'ouverture au 15 juillet précédent. Il retient ensuite que cette faute a contribué à accroître l'insuffisance d'actif résultant d'une augmentation considérable du passif pendant la période du 15 juillet au 21 juillet 2009.

6. En statuant ainsi, alors que la faute de M. B... n'ayant pu exister avant l'expiration du délai de quarante-cinq jours courant à compter du 15 juillet 2009 dont il disposait pour procéder à la déclaration de cessation des paiements, cette faute, fût-elle établie, ne pouvait avoir contribué à la naissance d'un passif constitué, selon ses constatations, au plus tard le 21 juillet 2009, le délai de déclaration n'étant pas encore expiré à ce moment, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

7. La condamnation au titre de l'insuffisance d'actif ayant été prononcée en considération de plusieurs fautes de gestion, la cassation encourue à raison de l'une d'entre elles entraîne, en application du principe de proportionnalité, la cassation totale de l'arrêt de ce chef.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 31octobre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne M. H... , en qualité de liquidateur de la société Valparaiso, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept juin deux mille vingt.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour M. B...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait retenu la responsabilité de M. V... B... pour avoir poursuivi abusivement une activité déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements et pour avoir perdu le droit au bail des locaux dans lesquels s'exerçait l'activité de la société, infirmé celui-ci en ce qu'il n'avait pas retenu sa responsabilité pour avoir déclaré tardivement la cessation des paiements de la société Valparaiso, constaté que M. V... B... avait déclaré la cessation des paiements de la société Valparaiso après l'expiration du délai légal pour y procéder et confirmé le jugement en ce qu'il avait condamné M. V... B... à payer à maître S... H... ès qualités la somme de 150.000 € à titre de contribution à l'insuffisance d'actif ;

aux motifs propres que «sur l'insuffisance d'actif, le passif définitivement admis dans la procédure collective s'élève à 6.235.750,61 € ; que compte tenu de l'actif réalisé, soit 2.316.338,64 € constitué du solde des comptes bancaires, du mouvement des créances clients et du prix de cession du fonds de commerce, l'insuffisance d'actif s'élève à 3.919.411,97 €, somme non contestée par M. B... qui fait cependant valoir qu'il faut la rapprocher du chiffre d'affaires de 16.552.098 € réalisé en 2008 ; que M. D... a versé une somme de 150.000 € en exécution des première décisions le condamnant ; que sur le retard dans la déclaration de cessation des paiements, le défaut de déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal de 45 jours, susceptible de constituer une faute de gestion, s'apprécie au regard de la seule date de la cessation des paiements fixée dans le jugement d'ouverture ou dans un jugement de report, en l'espèce le jugement d'ouverture qui l'a fixée au 15 juillet 2009 ; que la cessation des paiements n'ayant été déclarée que le 21 septembre 2009, le retard dans cette déclaration est suffisamment établi ; qu'elle est imputable à M. B... qui était directeur général délégué de la société Valparaiso et doit être à ce titre considéré comme un dirigeant de la société ; que les conséquences sur l'insuffisance d'actif de ce retard sont également patentes ; qu'en effet, il ressort des déclarations de créances versées aux débats que depuis la date de cessation des paiements, date à prendre en compte pour apprécier l'augmentation de l'insuffisance d'actif puisque le délai de 45 jours n'est que le délai maximum pour déclarer cette situation, le passif a été augmenté d'au moins 386.240,38 €, pendant la seule période du 15 juillet au 21 juillet 2009 : - soit 120.669 € représentant les cotisations AG2DR, - 77.717,13 € d'indemnités d'occupation du 15 juillet 2009 au 21 septembre 2009 (soit 2 mois et 6 jours d'indemnités d'occupation, laquelle s'élève à 105.146,70 € par trimestre), - 120,53 € de factures dures à la société Passion traiteur, - 4.813,54 € au titre des factures Amara, - 17.089,70 € au titre des factures De facto, - 68.728 € de cotisations URSSAF (août 2009), - 9.157,60 € au titre des factures Climafroid, - 3.962,70 € au titre des factures Stade de France, - 24.946,76 € de factures Dispa, - 59.495,42 € de factures les Jardins Albert ; que sur la perte du bail, en outre il apparaît qu'au jour du jugement d'ouverture le bail avait été résilié depuis une année et que l'expulsion de la société Valparaiso avait été ordonnée en mai 2009 en exécution d'un arrêt du 11 septembre 2008 ; qu'en effet, si la cour d'appel dans son arrêt du 11 septembre 2008, tout en indiquant dans les motifs de sa décision que la clause résolutoire avait produit ses effets de plein droit, n'a pas formellement constaté la résiliation du bail par l'effet de cette acquisition de clause résolutoire, le dispositif de cette même décision comporte une condamnation de la société Valparaiso au paiement d'une indemnité d'occupation qui suppose qu'il ait été mis fin au bail ; que l'ordonnance de référé du 11 mai 2009 n'ordonne d'ailleurs l'expulsion qu'en relevant « l'occupation actuelle sans droit ni titre de la société Valparaiso en suite de l'arrêt prononcé par la cour d'appel de Versailles le 11 septembre 2008 » ; que le pourvoi en cassation n'étant pas suspensif, l'arrêt du 11 septembre 2008 était donc passé, au jour du jugement d'ouverture, en force de chose jugée au sens de l'article 500 du code de procédure civile, de sorte que le bail était définitivement perdu depuis plus d'un an le 30 septembre 2009 ; que cette perte a causé un préjudice important à la société Valparaiso dont le fonds a perdu à cette occasion une grande partie de sa valeur qui est passée d'une évaluation à 950.000 € à une valeur de 203.000 € et M. B..., dirigeant, tout en poursuivant l'activité alors que la dette de loyer était supérieure à 560.000 €, n'a pas pris les mesures nécessaires à la conclusion d'un nouveau bail ou au maintien du bail en cours ; que sur la poursuite d'une activité déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements, la poursuite de l'activité déficitaire est en l'espèce manifeste ; que les résultats nets, tenant compte des charges supportées normalement par l'entreprise sont systématiquement déficitaires depuis 2006, celui-ci ayant atteint 786.076 € en 2008 et 1.045.534 € en 2009, rendant nécessaire une déclaration de cessation des paiements ; que cette faute de gestion, qui a une conséquence certaine sur l'aggravation du passif de la société, puisqu'elle a permis la création de nouvelles dettes sans pour autant créer de richesse au profit de l'entreprise, est donc suffisamment caractérisée ; qu'en outre les exercices déficitaires ont pesé sur les fonds propres de l'entreprise qui sont devenus négatifs ; que sur la sanction pécuniaire, sans contester avoir exercé des fonctions de direction, M. B... fait valoir que la direction effective de la société était en réalité confiée à M. D... et qu'il était chef pâtissier, qu'il ne détenait aucun pouvoir de signature et que ce n'est que dans le courant du 1er semestre 2009 qu'il a pu avoir connaissance de la situation de la société de sorte que l'éventuelle sanction doit tenir compte de ces circonstances ; que Me H... réplique que désigné dès 1996 en qualité de directeur général pour seconder le président, puis devenu directeur général délégué, il a activement participé à la vie sociale de l'entreprise, signé les procès-verbaux du conseil d'administration dont celui décidant la poursuite de l'activité nonobstant la perte de plus de la moitié des capitaux propres et qu'il disposait, outre d'un véhicule, d'une rémunération annuelle de 150.000 € ; que les trois fautes de gestion reprochées par le liquidateur doivent être retenues à l'encontre de M. V... B... en sa qualité de dirigeant de la société puisqu'il a été nommé directeur général délégué de la société, qu'il a accepté expressément ces fonctions lors du conseil d'administration du 29 août 2003 ; qu'il en était également administrateur et avait à ce titre la qualité de dirigeant de la société, ayant participé aux délibérations du conseil d'administration jusqu'en 2009 lorsqu'il a été décidé de ne pas procéder à la dissolution de la société malgré la perte de plus de la moitié du capital social ; qu'eu égard à la gravité et au nombre des fautes commises rapportées au montant de l'insuffisance d'actif qu'elles ont contribué à aggraver, à la rémunération des dirigeants, dont M. B..., qui a perçu 159.588 € de rémunération en 2008 et n'a pas réduit sa rémunération malgré les difficultés de la société, les premiers juges ont porté une juste appréciation en fixant à la somme de 150.000 € la condamnation en paiement de M. B..., le jugement étant confirmé sur ce point » ;

et aux motifs adoptés que « sur la direction de la société, Me H... , ès qualités, expose que selon l'extrait K-bis de la société Valparaiso M. D... en était le président directeur général et M. B... directeur général délégué et administrateur ; que pouvant l'un et l'autre engager seul la société Valparaiso vis-à-vis des tiers, ils sont tous deux des dirigeants de droit ; que M. B... ne conteste pas qu'en sa qualité d'administrateur sa responsabilité puisse être recherchée en tant que dirigeant de droit, mais fait valoir qu'il avait un statut de salarié, exerçant l'activité de chef pâtissier et responsable du département pâtisserie, l'empêchant d'exercer de manière effective son mandat de directeur général délégué ; qu'il relève que le liquidateur n'a assigné en responsabilité ni M. G... D..., administrateur, ni Mme L... Y..., que l'organigramme de la société Valparaiso présentait comme directeur général délégué ; que selon l'extrait K-bis de la société Valparaiso M. D... en était le président directeur général et M. B..., administrateur et directeur général délégué ; que l'article L. 225-56 II al.2 du code de commerce dispose que « Les directeurs généraux délégués disposent, à l'égard des tiers, des mêmes pouvoirs que le directeur général » ; qu'étant les seules personnes de la société habilitées à engager seuls la société vis-à-vis des tiers, M. D... et M. B... sont donc régulièrement attraits dans la présente instance en tant que dirigeants de droit ; que, sur la poursuite d'une activité déficitaire et la perte du droit au bail des locaux, compte tenu des transmissions universelles de patrimoine intervenues en 2008 au profit de la société Valparaiso il n'est pas possible de comparer les comptes de l'exercice 2008 avec ceux des exercices précédents ; qu'il ressort néanmoins des pièces versées aux débats que le résultat de l'ensemble intégré fiscalement au titre de l'exercice de 9 mois clos le 31 décembre 2007, soit Valparaiso et ses filiales Boa et Caracas, est une perte de 276 K€ ; que la perte d'exploitation a atteint 742,7 K€ en 2008 et a été portée à 1.001 K€ sur les 9 premiers mois de l'année 2009, soit 11 % du chiffres d'affaires de cette période, contre 4,5 % de celui de l'année 2009, les charges diminuant en moyenne mensuelle moins que le chiffre d'affaires mensuel, en baisse de 24 % entre 2008 et 2009 ; que compte tenu de la perte nette de l'exercice 2008 les capitaux propres de la société Valparaiso sont devenus négatifs (-69,9 K€), la structure financière étant particulièrement déséquilibrée, avec un fonds de roulement négatif de 2.191 K€, l'endettement totalisant 6.840 K€, à comparer à un actif circulant de 4.649 K€ ; qu'il est par ailleurs relevé que courant 2008 la société Valparaiso a cessé d'être détenue à 35 % par le groupe international Compass, société mère d'Eurest, un de ses principaux clients, la participation qu'elle détenait depuis 1995, soit plus de 12 ans, étant reprise à égalité par M. D... et M. B... ; que si les conditions de la sortie du capital de la société Valparaiso du partenaire historique de son développement, dont le rôle d'actionnaire est précisé dans les statuts versés aux débats, n'ont pas été communiquées, cette évolution ne pouvait être de nature à rassurer les autres partenaires de l'entreprise et préfigure la réduction des concours bancaires en 2009 et la cessation des paiements ; que si les constatations de l'administrateur judiciaire confirment que compte tenu de l'opposition des élus du personnel les dirigeants ne sont parvenus à mettre en oeuvre que très partiellement les économies et réductions d'effectif qu'ils envisageaient de réaliser, le tribunal constate que le montant des provisions inscrites au titre du personnel dans le bilan à fin 2008 est relativement faible (165,6 K€) ; que les dirigeants ont ainsi poursuivi au moins à compter de la fin de l'année 2008 l'activité déficitaire de la société Valparaiso alors qu'ils ne pouvaient pas ignorer que tout alourdissement des charges était de nature, en aggravant une situation financière déjà obérée, à avoir un impact négatif sur la recherche de solutions pour l'entreprise, ce qui caractérise une faute de gestion au visa de l'article L. 651-2 du code de commerce ; que les pièces versées aux débats montrent en outre que les dirigeants n'ont pris aucune mesure pour assurer la pérennité du fonds de commerce, conduisant à l'acquisition de la clause résolutoire du bail des locaux de production de la société Valparaiso suite à l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 11 septembre 2008 ; que les dirigeants ne rapportent pas la preuve d'avoir ensuite pris des mesures pour que la société Valparaiso tire les conséquences de cette décision non susceptible d'un recours suspensif d'exécution, étant souligné qu'au cours de la période d'observation le coût du déménagement des activités a été estimé à environ 1.000 K€ ; que l'absence de mention de la perte du bail dans le rapport des commissaires aux comptes sur l'exercice 2008 tend à montrer que les dirigeants n'ont pas pris conscience de l'importance de cet arrêt sur la pérennité de la société Valparaiso ; qu'en ne réglant pas le litige que la société Valparaiso avait avec le bailleur depuis plusieurs années les dirigeants ont directement contribué à la perte du droit au bail et à l'augmentation corrélative de l'insuffisance d'actif, ce qui constitue une faute de gestion au visa de l'article L. 651-2 du code de commerce ; que, sur les sanctions patrimoniales, aux termes de l'article L. 651-2 du code de commerce, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion ; qu'il a été établi que M. D... et M. B... ont commis des fautes de gestion en poursuivant l'activité déficitaire de la société Valparaiso et au travers de la perte du bail des locaux de la société à Colombes, qui ont contribué à une insuffisance d'actif de 3.919 K€ ; que les rémunérations et avantages en nature reçus par les dirigeants au titre de l'exercice 2008 ont été de 159,6 K€ pour M. B... et de 158 K€ pour M. D... ; que ces montants apparaissent du même ordre que ceux des années précédentes et ne pas avoir été réduits en 2009 dans le cadre d'une recherche d'économies ; que M. B... ne peut s'exonérer de sa responsabilité de dirigeant de droit au motif que sa participation à la gestion de la société ne pouvait qu'être que fictive, compte tenu de son emploi en tant que chef pâtissier et qu'il aurait laissé agir M. D... ; que le quantum de sa condamnation sera le même que pour M. D..., étant relevé qu'au titre de son emploi M. B... a reçu des AGS une indemnité de 69.240 € ; que dans ces conditions, le tribunal, usant de son pouvoir d'appréciation, condamnera M. D... et M. B... à payer, chacun à Me H... , ès qualités, la somme de 150.000 €, en application de l'article L. 651-2 du code de commerce, majorée des intérêts au taux légal à compter de la signification du présent jugement, avec capitalisation des intérêts » ;

alors 1°/ que dans ses dernières conclusions d'appel du 13 septembre 2017, M. B... faisait expressément valoir qu'il occupait au sein de la société Valparaiso un emploi de salarié en qualité de chef pâtissier et responsable du département pâtisserie, qu'ils s'étaient ainsi répartis les tâches en fonction de leurs domaines de compétence respectifs, pour M. D... la gestion et la direction financière de la société, pour M. B... la pâtisserie, que « la direction effective de la société Valparaiso était confiée à M. D..., fort d'une grande expérience en gestion d'entreprise, qui ne l'a jamais démenti » et qu'il ne détenait aucun pouvoir de signature concernant lesdits comptes bancaires, seuls M. D... et Mme C... ayant cette habilitation (cf. p. 3, al. 10, p. 4, al. 1, et p. 28) ; qu'en retenant que M. B... ne contestait pas avoir exercé des fonctions de direction, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de l'exposant et ainsi violé l'article 4 du code de procédure civile ;

alors 2°/ que seuls les dirigeants de droit ou de fait qui ont commis une faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif peuvent être condamnés à supporter, en tout ou en partie, le montant de cette insuffisance d'actif, ce qui suppose, par hypothèse, qu'ils aient effectivement exercé une direction effective de la société ; qu'en retenant que les trois fautes de gestion reprochées par le liquidateur devaient être retenues à l'encontre de M. V... B... en sa seule qualité de dirigeant de droit de la société sans rechercher, ainsi qu'il lui était expressément demandé par l'exposant, si celui-ci avait exercé la direction effective de la société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce, dans sa version applicable à la cause issue de l'ordonnance du 18 décembre 2008 ;

alors 3°/ qu' en tout état de cause, si l'omission de déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal est ainsi susceptible de constituer une faute de gestion, c'est à la condition qu'elle ait contribué à l'insuffisance d'actif ; que cette condition n'est remplie que si l'insuffisance d'actif s'est aggravée entre la date à laquelle la cessation des paiements aurait dû être déclarée (45ème jour suivant sa survenance) et celle à laquelle elle l'a été ; que l'augmentation du passif constatée entre la cessation des paiements et la date à laquelle le dirigeant aurait dû la déclarer est sans incidence sur la responsabilité du dirigeant ; qu'en l'espèce, il était acquis aux débats que le jugement d'ouverture avait fixé au 15 juillet 2009 la date de cessation des paiements de la société Valparaiso, de sorte que M. B... aurait dû la déclarer au plus tard le 29 août 2009 ; qu'en tenant compte de l'augmentation du passif pendant la période du 15 juillet au 21 juillet 2009, donc antérieure à la date à laquelle devait être déclaré l'état de cessation des paiements, pour dire que la déclaration effectuée tardivement, le 21 septembre 2009, avait contribué à l'augmentation de l'insuffisance d'actif, la cour d'appel a violé l'article L. 651-2 du code de commerce, dans sa version applicable à la cause issue de l'ordonnance du 18 décembre 2008, ensemble l'article L. 640-4 du code de commerce dans sa version applicable à la cause antérieure à l'ordonnance du 12 mars 2014 ;

alors 4°/ qu'en tout état de cause, si l'omission de déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal est susceptible de constituer une faute de gestion, le juge ne peut décider de faire à ce titre supporter, en tout ou partie, le montant de l'insuffisance d'actif sur les dirigeants de droit ou de fait que si cette abstention fautive a contribué à aggraver le montant du passif de la société ; que pour retenir une augmentation de passif d'au moins 386.640,38 € pendant la seule période du 15 juillet au 21 juillet 2009, la cour d'appel a tenu compte d'une créance du bailleur, la SCI Foncière Médicale, de 77.717,13 € au titre d'indemnités d'occupation du 15 juillet 2009 au 21 septembre 2009 sans rechercher, ainsi qu'il lui était expressément demandé par l'exposant, s'il ne résultait pas du tableau établi par le bailleur, joint à sa déclaration de créance du 20 octobre 2009 au passif la procédure collective, versée aux débats en cause d'appel tant par l'exposant (pièce n° 10) que par le liquidateur (pièce n° 12), que le 3ème trimestre 2009 avait été facturé le 1er juillet 2009, soit antérieurement au 15 juillet 2009, date de cessation des paiements de la société Valparaiso fixée par le jugement d'ouverture, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce, dans sa version applicable à la cause issue de l'ordonnance du 18 décembre 2008 ;

alors 5°/ qu'en tout état de cause, si l'omission de déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal est susceptible de constituer une faute de gestion, encore faut-il, pour retenir la responsabilité du dirigeant à cet titre, que cette abstention ait contribué à aggraver le montant du passif de la société ; que pour retenir une augmentation de passif d'au moins 386.640,38 € pendant la seule période du 15 juillet au 21 juillet 2009, la cour d'appel a tenu compte d'une créance AG2R de 120.669 € sans rechercher, ainsi qu'il lui était expressément demandé par l'exposant, si, s'agissant de cotisations de retraite complémentaire, le 3ème trimestre 2009 n'était pas exigible qu'au mois d'octobre 2009, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce, dans sa version applicable à la cause issue de l'ordonnance du 18 décembre 2008 ;

alors 6°/ qu'en tout état de cause, pour retenir que la responsabilité de M. V... B... était engagée du fait de la perte du droit au bail des locaux dans lesquels s'exerçait l'activité de la société, la cour d'appel a considéré que cette perte avait causé un préjudice important à la société Valparaiso dont le fonds avait perdu à cette occasion une grande partie de sa valeur qui était passée d'une évaluation à 950.000 € à une valeur de 203.000 € et que M. B..., tout en poursuivant l'activité nonobstant une dette de loyer supérieure à 560.000 €, n'avait pas pris les mesures nécessaires à la conclusion d'un nouveau bail ou au maintien du bail en cours ; qu'en se déterminant ainsi sans caractériser en quoi cette faute aurait contribué à l'insuffisance d'actif, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce, dans sa version applicable à la cause issue de l'ordonnance du 18 décembre 2008 ;

alors 7°/ qu'en tout état de cause, pour retenir que la responsabilité de M. V... B... était engagée pour avoir poursuivi abusivement une activité déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements, la cour d'appel a relevé que les résultats nets, tenant compte des charges supportées normalement par l'entreprise étaient systématiquement déficitaires depuis 2006, celui-ci ayant atteint 786.076 € en 2008 et 1.045.534 € en 2009, rendant nécessaire une déclaration de cessation des paiements ; qu'en statuant ainsi quand il résultait des bilans pour l'année 2007, versés aux débats en cause d'appel par l'exposant (pièce n° 19), que le résultat d'exploitation de la société Valparaiso était bénéficiaire, la cour d'appel a violé l'article 1103 du code civil ;

alors 8°/ qu'en tout état de cause, pour retenir que la responsabilité de M. V... B... était engagée pour avoir poursuivi abusivement une activité déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements, la cour d'appel a relevé que les résultats nets étaient systématiquement déficitaires depuis 2006, celui-ci ayant atteint 786.076 € en 2008 et 1.045.534 € en 2009, rendant nécessaire une déclaration de cessation des paiements ; qu'en statuant ainsi quand elle aurait dû prendre en compte, ainsi que l'exposant le faisait valoir, le résultat d'exploitation et non le résultat net, la cour d'appel a violé l'article L. 651-2 du code de commerce, dans sa version applicable à la cause issue de l'ordonnance du 18 décembre 2008 ;

alors 9°/ qu'en tout état de cause, l'insuffisance d'actif susceptible d'être mise à la charge du dirigeant en cas de faute de gestion est celle qui apparaît à l'ouverture de la procédure collective ; qu'en l'espèce, la procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Valparaiso a été ouverte par un jugement du 30 septembre 2009 ; que pour imputer à M. B... la poursuite abusive d'une exploitation déficitaire, la cour d'appel a pris en compte le résultat au 31 décembre 2009, sans préciser si, à la date d'ouverture collective, le résultat était ou non déficitaire ; qu'en statuant de la sorte, sans préciser quelle était l'insuffisance d'actif à la date de l'ouverture de la procédure collective, la cour d'appel a violé l'article L. 651-2 du code de commerce, dans sa version applicable à la cause issue de l'ordonnance du 18 décembre 2008. ECLI:FR:CCASS:2020:CO00270
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